Pourquoi un même livre, une même formation, un même séminaire, produit révélation et changement explosif dans la vie de certains, alors que chez d’autres, ce savoir supposé les aider, les enferme un peu plus dans leurs erreurs ? De nombreuses personnes se lancent le défi de lire une trentaine, une cinquantaine, voire même une centaine de livres pour essayer de résoudre un problème ou comprendre un sujet intellectuellement complexe tel que la confiance en soi, l’entrepreneuriat, ou encore le dépassement de soi…
Toutefois, juste une poignée d’entre eux conservera leur motivation intacte, jusqu’à la réussite victorieuse de ce challenge.
Ceci dit, est ce que ses personnes si vaillantes sont vraiment toutes gagnantes ?
En effet, bon nombre de ces lecteurs assidus ayant accompli ce challenge en ressortiront plus désorientés, plus affaiblis que ceux qui auraient abandonné au bout du 3e livre.
Mais comment la lecture des œuvres des plus grands esprits de ce monde peut t’impacter négativement ?
Pourquoi certains se créent une vie de dingue alors que d’autres stagnent et ne font que renforcer ce qui ne va pas dans leur propre histoire ?
Dans les lignes qui suivent, je te propose de découvrir les clés qui ont permis à de nombreuses personnes d’élucider cette question et de passer au niveau supérieur.
Le ciment du savoir, c’est ta propre histoire.
Imagine maintenant un livre qui traite à la fois de séduction, de lâcher prise, de méditation, de la loi de l’attraction, de productivité et de dépassement de soi.
Certains lecteurs ne retiendront que quelques idées de ce livre et d’autres se contenteront de lire uniquement les chapitres qui les intéressent le plus.
Il s’agit d’un comportement naturel dans la mesure où l’être humain cherche instinctivement le confort… Par conséquent, il sélectionnera et intégrera donc une information qui le conforte dans sa pensée.
Le ciment entre ce savoir partagé et ce que le lecteur pourra en extraire, c’est son histoire personnelle. Par exemple, une prof de yoga sera probablement fascinée par le chapitre sur la méditation, mais ne portera que peu d’attention à celui qui traite de la productivité (toujours plus, toujours plus vite).
Inversement, un entrepreneur ultra-productif ne lira peut-être que le chapitre sur la productivité.
Chacune de ces deux personnes orientera son attention en fonction de ses intérêts et de son histoire.
Si méditer est un plaisir pour la prof de yoga, cette même activité sera vécue comme une torture pour ce chef d’entreprise qui ne pourra pas s’empêcher de penser à la liste des tâches qui l’attend.
Par conséquent, selon la perception de la prof de yoga, le chef d’entreprise ne peut pas profiter de l’instant présent. Il est donc dans l’erreur.
Inversement, notre entrepreneur à succès estime que la prof de yoga a besoin de développer sa productivité pour générer un véritable salaire qui lui permettra d’assurer son avenir.
Alors qui a tort, qui a raison ?
À l’instar de ses deux personnages, nous utilisons en permanence notre histoire et nos perceptions pour nous diriger vers ce qui nous paraît confortable.
Par conséquent, tu auras beau lire une centaine ou un millier de livres sur un sujet, si tu te contentes de te conforter dans une opinion déjà implantée en toi, tu prends le risque de stagner, voire même de te confiner dans des schémas de pensées limitantes.
Pour sortir de ce prisme de pensée restreinte qui te tire vers une réflexion inutile, pour définir qui des deux (le chef d’entreprise ou la prof de yoga) a raison, tu dois d’abord accepter que paradoxalement, la réponse est contre-intuitive, et se trouve dans la maîtrise des opposés.
Pourquoi embrasser les opposés ?
L’amiral James Stockdale était un héros militaire. Adulé, admiré, respecté, sa vie bascula le 9 septembre 1965, lorsqu’il fut capturé et emprisonné par l’armée Vietnamienne.
Projeté violemment dans une insoutenable terreur et une profonde solitude, son quotidien se jonchait de torture, de malnutrition, de cruauté de la part de ses gardiens et de ses codétenus.
Au fil des mois, James voyait ses amis dépérir, jusqu’à en rendre l’âme.
Mais malgré cela, et en dépit de la faiblesse de ses jambes qui ne le portaient plus, son esprit lui, restait intact, puissant et imprégné d’un profond désir de survie.
« Moi, je n’ai jamais douté non seulement que je serai libéré, mais aussi que j’en sortirai plus fort et que je ferai de cette expérience l’événement décisif de ma vie, que, rétrospectivement, je ne l’échangerais pas contre celle d’un autre ».
Pour faire preuve d’une telle force mentale, James avait un secret : 3 ans auparavant, il avait découvert un livre. “ Le livre Epictetus Enchiridion m’a sauvé la vie”.
Pour faire preuve d’une telle force mentale, James avait un secret : il avait constaté qu’au début de sa captivité les prisonniers qui pensaient être libérés le mois prochain, à Noël ou l’année suivante étaient plus robustes.
Mais qu’au fil des années ces mêmes optimistes furent les premiers à mourir.
Leurs pensées positives qui les aidaient à supporter leurs tourments sur le court terme se transformaient souvent, au fil du temps, en profonde désillusion. Cet optimisme se convertissait en sentiment ténébreux qui les dirigeait inexorablement vers leur perte.
Une flamme d’espoir brûlait également dans le cœur de Jim, pourtant il demeurait réaliste et calme face aux fausses illusions.
Il restait calme face aux espoirs.
Il restait calme face aux peurs.
Cette harmonie entre sa capacité à percevoir sa triste condition de prisonnier de guerre et, à l’opposé, sa dose d’optimisme fut pour James salvatrice.
Après 7 longues années de captivité, il était enfin libre et a tenu sa promesse envers lui-même en faisant de son vécu tragique la force de son présent.
Une force tellement puissante qu’il deviendra l’un des militaires les plus récompensés de l’armée américaine, un philosophe respecté et un politicien qui a failli devenir Vice-président des États-Unis.
Une étude(1) effectuée pendant 18 ans par des chercheurs britanniques corrobore la vision de James.
Elle révèle que 80% de la population occidentale serait composée d’individus optimistes. Il en ressort également que ces personnes ont tendance à espérer de bonnes nouvelles, et finissent déçues la plupart du temps. Selon cette même étude, “la clé” du bonheur se situerait chez les réalistes-optimistes, foncièrement minoritaires, et bien moins sujets à toutes sortes de déceptions.
En d’autre termes, intégrer des pensées qui en apparence paraissent opposées est aussi complexe que gratifiant.
La gestion des paradoxes forge l’excellence.
Le maître maîtrise les paradoxes. Il n’y a pas d’excellence sans être capable de maîtriser deux opposés en même temps.
La puissance de cette phrase résonne dans la plupart des discours des grands entrepreneurs, sportifs et artistes.
Henri Seydoux, fondateur de Parrot, une entreprise de plus 600 salariés, se définit comme un autodidacte visionnaire, parfois rêveur, qui garde les pieds sur terre et s’ancre ardemment dans la réalité.
Paradoxale, non ?
Marc Simoncini, fondateur de Meetic conseils pour prospérer dans un contexte difficile d’être humble tout en restant résilient et audacieux; accepter l’échec sans pour autant abandonner; suivre son intuition et être dans l’action, sans perdre de vue son plan de bataille et une bonne planification.
Jean de la Rochebrochard est à la tête de l’un des fonds d’investissement de start-up les plus actifs et importants au monde.
Sa force est d’être capable de prédire si des entrepreneurs sont susceptibles de réaliser leurs rêves en passer leur business au niveau supérieur. Pour cela, il cherche en lui ce qu’il définit comme une bonne balance des paradoxes.
“ Les bons entrepreneurs ont une balance de leurs paradoxes. Entre l’optimisme et la clairvoyance ; entre la qualité et la vélocité”…”Un bon entrepreneur doit être capable de se nourrir des autres, des apprentissages et en même temps de savoir-faire des choix singuliers pour trouver son originalité”.
Toujours dans cette même optique, mais dans un autre cadre, dans les vestiaires de la finale de la coupe du monde 98, Franck Leboeuf décrit son état d’esprit à quelques minutes du coup d’envoi d’un match regardé par quasiment 2 milliards d’individus.
Chacun des gestes qu’il réalisera lors des prochaines 90 minutes marquera l’histoire.
Il s’isole, optimise sa concentration, l’adrénaline monte et les palpitations s’intensifient. Ce qui se passe à cet instant est tellement vital pour lui. Il est prêt à mourir sur ce terrain.
Son objectif : s’isoler, atteindre une profonde projection mentale et se focaliser intérieurement sur son match. Il visualise son premier contrôle, sa première passe, et STOP !
Il va déconner avec ses potes Marcel Desailly et Didier Deschamps.
Franck nous donne une leçon magistrale dans la gestion des dualités, des opposés et des paradoxes. “Donc moi, j’avais ces moments-là, de solitude, puis après je me dis que c’est trop, qu’il faut être mesuré, ne pas être enfermé tout le temps.”
«Tenez-vous prudemment entre les deux extrêmes. Marchez au milieu. C’est le plus sûr des systèmes.» Ovide poète latin en 43 avant Jésus-Christ
Si à son époque, Ovide faisait l’apologie de cette vision d’excellence, les vertus de la gestion des opposés sont désormais soutenues par de nombreuses études scientifiques.
Par exemple, les chercheurs dénotent que la privation de liberté est vécue comme une souffrance.
Mais paradoxalement, bien que l’être social que nous sommes estime que son bonheur découle des libertés, de nombreuses études démontrent que l’abondance de choix ou de liberté crée un sentiment de souffrance et nous pousse vers de mauvaises décisions. (2) – (3) – (4).
Une autre étude (5), sur 139 superviseurs chinois, indique que les leaders capables de maîtriser des compétences opposées ont des employés plus épanouis et créatifs.
Effectivement, un manager en mode paix, harmonie, gentillesse qui s’interdit d’être directif, assertif, ferme et qui souvent ne sait pas trop dire “non” tend à se créer des relations conflictuelles.
Inversement, un manager autoritaire, ferme qui cherche via cette attitude à diriger ses subalternes vers plus d’ordre et de productivité tend à les démotiver et obtient donc l’effet inverse.
Le manager efficace sait faire preuve de fermeté, mais possède également le sens de l’écoute, c’est un équilibre.
« Lors d’un entretien d’embauche, je cherche toujours à savoir si le candidat a eu à gérer des paradoxes dans son vécu »… « Le monde est rempli de paradoxes, donc les leaders de demain doivent être capables de gérer les contradictions et d’harmoniser les opposés » Harry Starren, (l’un des plus grands experts mondiaux en Management, leadership et communication).
Passe ta vie au niveau supérieur
Notre tendance naturelle est de nous focaliser uniquement sur une partie de l’équation. Cependant, derrière la confiance en soi, il y a le doute ; derrière la vision, il y a l’action ; et derrière la parole, il y a l’écoute. C’est uniquement en trouvant le juste équilibre entre les deux faces d’une même pièce que tu pourras réellement passer ta vie au niveau supérieur.
Devenir un maître passe par la maîtrise des opposés, l’équilibre entre les paradoxes, et cela, sur tous les plans de ta vie.
Chaque être humain détient en lui les clés du succès et de la réussite. En prendre conscience maintenant, te permet d’agir maintenant.
Un cœur tranquille et un esprit à l’affût, capables d’intégrer des concepts aussi complexes que la maîtrise des paradoxes, c’est tout ce dont tu as besoin pour briser les obstacles qui te semblent insurmontables.
Et cette vision impactera le monde qui t’entoure.
Pour aller plus loin, je te propose cette clé étonnante pour comprendre comment dépasser la peur de l’échec et entreprendre ?
Références :
*1 Neither an Optimist Nor a Pessimist Be: Mistaken Expectations Lower Well-Being
*2 Doing Better but Feeling Worse: The Paradox of Choice. Auteur: Schwartz, Barry Ward, Andrew
*3 Less is more: The paradox of choice in voting behavior Auteur: Saul Cunow; Scott Desposato; Andrew Janusz; Cameron Sells
4*The Paradoxical Consequences of Choice: Often Good for the Individual, Perhaps Less So for Society?
5* Why and when paradoxical leader behavior impact employee creativity: Thriving at work and psychological safety